« Combien de temps Seigneur vais-je t’appeler au secours, et tu n’entends pas crier contre la violence, et tu ne délivres pas ! Devant moi, pillage et violence ; disputes et discorde se déchaînent… » L’appel au secours d’Habacuc à on Seigneur pourrait être le nôtre aujourd’hui : Chacun peut faire le parallèle avec la situation actuelle de notre monde : violences, guerres, famines. Les mêmes horreurs se répètent. « Violences et discordes se déchainent » avec un niveau de terreur multiplié par les arsenaux d’armes de destruction : regardez l’Ukraine, Gaza, la misère des migrants sur les routes du monde. Seigneur, « pourquoi m’obliges-tu à regarder l’abomination et restes-tu à regarder notre misère ? » Dieu abandonne-t-il notre monde, est-il absent ?
Habacuc, malgré tout, ne perd pas la foi. Il reste dans cette attente confiante du Seigneur, et dans l’évangile, les apôtres, reconnaissant leur manque de foi, sont invités à prendre la tenue de service.
Habacuc crie sa douleur, sa détresse et fait entendre sa plainte à Dieu qui ne semble pas l’entendre. Dans les psaumes, la douleur des hommes est omniprésente. Nous aussi chrétiens, nous avons le droit de crier notre détresse à Dieu, de faire entendre nos cris et nos pleurs lorsque la vie est trop dure.
Mais dans l’adversité, Habacuc tient bon « Je guetterai ce que dira le Seigneur ». Il a la certitude que l’horizon s’éclaircira, que la lumière viendra, que le Seigneur se manifestera. Il fait donc confiance, il tient bon dans la foi.
Le Seigneur lui répond en l’invitant à « mettre par écrit la vision sur des tablettes pour qu’on puisse la lire couramment ». Autrement dit, le Seigneur lui demande de ne pas se laisser submerger par les émotions et sentiments qu’il ressent dans l’environnement violent qui est le sien. Il l’invite à s’assoir, à prendre du recul, à être disponible et à écrire. Cette invitation est devenue pressante aujourd’hui, avec les réseaux sociaux qui captent notre attention, nos émotions, nos réactions immédiates, avec le danger de devenir captif et de nous laisser submerger, au risque de ne plus conduire notre vie. Prendre le temps de se poser, de prier, de méditer, est essentiel pour notre équilibre et pour notre vie de chrétien.
Dieu nous invite donc à la patience, à la confiance, à la fidélité. « Alors cette vision se réalisera, dit-il à Habacuc, mais seulement au temps fixé, elle tend vers son accomplissement, elle ne décevra pas ». Ici, foi et espérance se rejoignent. « L’Espérance ne déçoit pas ».
Les apôtres, eux sont conscients de leur manque de foi : « Augmente en nous la foi », c’est leur demande ; parfois c’est bien la nôtre. Mais en fait, cela n’a pas de sens de mesurer sa foi. L’important c’est de compter sur le Seigneur. Lui seul peut déplacer les montagnes. Ce que Jésus demande, c’est de Lui faire confiance, car « rien n’est impossible à Dieu » : comme ce grand arbre qui irait se planter dans la mer ! Ne vous découragez donc pas, Vous êtes au service de Dieu et des hommes, au service d’une tâche qui vous dépasse, certes, mais qui ne vous écrase pas. C’est Dieu qui a la responsabilité de l’avènement de son Royaume, et nous nous sommes de simples serviteurs. Loin de nous décourager, le Seigneur nous demande d’être « en tenue de service ». Il a besoin de nous pour servir la mission, chacun à notre place. Nous collaborons à l’œuvre du Seigneur, souvent de façon imparfaite, mais avec cela, le Seigneur fait sa moisson. Dans cet évangile, foi et service se rejoignent, foi et charité se rencontrent. « Il suffit d’un peu de foi…cela suffit à Dieu pour faire des miracles. Encore faut-il la mettre à son service ». (M-N Thabut)
En ce dimanche à Rome, c’est le jubilé du monde missionnaire et la 111 ème journée mondiale du migrant et du réfugié. Ce n’est pas un hasard. Ces deux mondes se connaissent, se rencontrent. C’est la fraternité vécue entre cultures différentes dans le cadre de l’Eglise universelle. Le Pape Léon XIV dans sa lettre à l’occasion de cette journée note que « Dans un monde assombri par les guerres et les injustices, même là où tout semble perdu, les migrants et les réfugiés se dressent comme des messagers d’espérance. Leur courage et leur ténacité sont le témoignage héroïque d’une foi qui voit au-delà de ce que nos yeux peuvent voir,
et leur donne la force de défier la mort sur les différentes routes migratoires contemporaines. » Léon XIV poursuit : « De manière particulière, les migrants et les réfugiés catholiques peuvent devenir aujourd’hui des missionnaires d’espérance dans les pays qui les accueillent…. En effet, par leur enthousiasme spirituel et leur vitalité, ils peuvent contribuer à revitaliser des communautés ecclésiales…. Leur présence doit alors être reconnue et appréciée comme une véritable bénédiction divine, une occasion de s’ouvrir à la grâce de Dieu qui donne une nouvelle énergie et une nouvelle espérance à son Église : « N’oubliez pas l’hospitalité, car c’est grâce à elle que quelques-uns, à leur insu, hébergèrent des anges » (He 13, 2).*En référence aux 3 mystérieux visiteurs accueillis par Abraham au chêne de Mambré. Et Léon XIV poursuit : « D’autre part, les communautés qui les accueillent peuvent également être un témoignage vivant d’espérance. Espérance comprise comme promesse d’un présent et d’un avenir où la dignité de tous en tant qu’enfants de Dieu est reconnue. Ainsi, les migrants et les réfugiés sont reconnus comme des frères et sœurs, membres d’une famille où ils peuvent exprimer leurs talents et participer pleinement à la vie communautaire. » Fin de citation Dans notre paroisse nous avons la chance d’accueillir des familles d’origine étrangère. Nous sommes heureux que nos communautés soient des lieux de rencontre et de dialogue où chacun, quelle que soit son origine et son histoire peut trouver sa place à la table commune de l’Eucharistie et de la fraternité. Nous sommes heureux d’accueillir, parmi les cathéchumènes, des migrants. Ils sont accueillis bras ouverts, qu’ils aient des papiers ou pas, car nous sommes tous des frères et des sœurs, fils et filles de Dieu.
Avec eux partageons la même Foi, la même Espérance, par l’accueil et le service, dans la Charité du Christ.
Yves Michonneau, diacre